Metoo à l’hôpital : « J’ai bon espoir pour la suite »

Publié : 17 avril 2024 à 17h34 par Hugo Harnois

Porte d'entrée d'un hôpital - Photo d'illustration
Porte d'entrée d'un hôpital - Photo d'illustration
Crédit : Pixabay - Libre de droit

#Metoo, #Metoo théâtre, #Metoo garçon, et, désormais, #Metoo à l’hôpital ! Le nouvel hashtag pour dénoncer tout type de violences sexuelles est apparu récemment suite aux accusations de l’infectiologue Karine Lacombe contre l’urgentiste Patrick Pelloux.

78% des femmes qui travaillent à l’hôpital ont été victimes de comportements sexistes, et, parmi elles, près d’un tiers auraient même subi des gestes inappropriés, voire des attouchements sexuels. Ces chiffres impressionnants viennent d’un baromètre mis en place par l’association « Donner des elles à la santé », en partenariat avec l’institut de sondage Ipsos.

 

Pas de surprise

Créé en 2020, le collectif est composé de médecins et de directeurs d’hôpitaux : « des gens de terrain qui travaillent ensemble pour la même cause, celle de lutter contre les discriminations, et les violences sexistes et sexuels à l’hôpital », explique la docteure Géraldine Pignot, la présidente d'honneur de « Donner des elles à la santé », également chirurgienne-urologue à Marseille.

Depuis les accusations de l’infectiologue Karine Lacombe contre l’urgentiste Patrick Pelloux, les témoignages pleuvent au sein du domaine hospitalier, qu’ils s’agissent de médecin, d’infirmières ou d’étudiantes. Une libéralisation de la parole qui ne surprend pas du tout la docteure. Il n’y a qu’à regarder les statistiques de ce fameux baromètre, mis en place depuis quatre ans et interrogeant chaque année 250 hommes et 250 femmes au hasard et de manière représentative sur l’ensemble du territoire français. L’urologue va plus loin : « ces femmes qui dénoncent des violences, pour seulement moins de 20% d’entre elles, des sanctions ont été prises par la hiérarchie de leur établissement. Donc il y a bien une libération de la parole, mais il reste encore des actions à mener concrètement pour lutter contre ces violences sexistes et sexuels à l’hôpital. »

 

Attouchements, mains aux fesses, propos sexistes...

Parmi les témoignages que l’on retrouve dans ce baromètre, il est souvent question d’attouchements, de mains aux fesses, de propos sexistes et discriminatoires sur les capacités ou l’apparence physiques des femmes à l’hôpital. Mais comment expliquer cette « banalisation de ces comportements à l’hôpital », comme le nomme Géraldine Pignot ? Selon elle, « on a l’excuse de dire qu’on est dans des milieux professionnels où, effectivement, on est confrontés à la mort, à la maladie, avec parfois, un quotidien difficile à vivre. Pour autant, ça n’excuse pas ces comportements sexistes extrêmement pénalisants, pour les jeunes femmes notamment, en termes d’évolution de carrière. » 

Au-delà de gestes et de comportements « inacceptables » justifiés par certains pour détendre une atmosphère parfois pesante, « l’omerta règne à l’hôpital », pour la chirurgienne : « il y a une impunité très marquée due à une hiérarchie très présente. Donc libérer la parole est compliqué, car derrière, on n’est pas sûr qu’il y ait des actions concrètes qui soient mises en place de la part des établissements ou des instances. »

 

L'hôpital, plus impacté que d'autres sphères ?

Cinéma, théâtre, musique… Au fil des ans, les violences sexistes et sexuels subies par les femmes se sont multipliées au sein des différentes sphères sociétales. Mais à en croire la présidente de l’association « Donner des elles à la santé », l’hôpital serait l’un des domaines les plus impactés aujourd’hui : « la situation est vraiment exacerbée à l’hôpital, et l’institut de sondage qui fait ce baromètre avec nous a été extrêmement choqué des chiffres qui ont été rapportés par les médecins hospitaliers, en nous disant qu’il n’avait vu ça dans aucune autre entreprise ni dans aucun autre sondage sur le sujet. On a vraiment des chiffres qui sont très alarmants à l’hôpital, probablement à cause de cette impunité qui règne encore. »

C’est pourquoi des solutions rapides doivent être apportées pour tenter d’endiguer le phénomène. D’abord avec un changement d’état d’esprit des jeunes générations, « davantage sensibilisées sur les comportements sexistes, sur ce qui est acceptable et sur ce qui ne l’est pas. Elles sont le levier indispensable pour qu’on fasse bouger les lignes à l’hôpital », clame la Marseillaise.

La sensibilisation ne doit pas exclusivement se faire auprès d’un jeune public, mais aussi à l’égard des managers hospitaliers, « pour leur faire comprendre que ces sujets-là doivent être abordés, et surveillés de près », poursuit l’urologue. Cette dernière souhaite enfin une politique de tolérance 0 à mettre en place dans tous les établissements « pour qu’aujourd’hui, quand un signalement survient, il puisse y avoir un process de gestion, et derrière, une sanction. » Géraldine Pignot a finalement bon espoir pour la suite en se rappelant que l’égalité femme-homme est une grande cause du quinquennat d’Emmanuel Macron.